Le centre touristique dans lequel nous sommes en HelpX depuis bientôt un mois, n'est pas qu'un simple centre de chien de traîneau. D'autres activités en relation avec la nature y sont organisées, et nous avons eu la chance d'avoir pu participer à l'une d'entre elles le week-end dernier: Un stage de survie !


Deux jours dans le bois avec un guide spécialisé dans la survie, pour préparer les randonneurs à la situation difficile lorsque l'on se perd en forêt et qu'on ne retrouve plus de civilisation à la nuit tombée. Bien sur, ce n'est pas en France que cela pourrait arriver tant le pourcentage de foret est mince comparé à l'empreinte humaine, mais ici, au Québec, les bois sont bien plus denses et les habitations bien moins présentes ! Nous avons d'ailleurs pu en faire l'expérience puisque notre guide, Alex, nous à fait galérer dans une quantité de neige à travers le bois, à seulement quelques pas d'un refuge que personne n'avait repéré.


Nous voilà donc partis pour une aventure totalement extrême pour nous, ou nous allons quitter pour de bon notre zone de confort: Construction d'un camp en plein bois, nuitée dans un abris 100% naturel, pas de nourriture et comme disent les québécois, la cerise sur le Sunday, une météo des plus dégueulasse possible et inimaginable.



C'est donc après avoir bien galéré pendant deux petites heures de marche à travers le bush Québécois que nous avons construit notre camp pour la nuit. Accompagnés d'une pluie verglaçante, nous voilà donc parti un à un en recherche des outils offerts par Dame Nature à la fin d'un mois de mars, pour construire un abri et se protéger des intempéries et du froid encore hivernal. La quête de « fondations en bois mort et tuiles végétales » est lancée, et nous voilà tous en course pour l'atteindre les premiers, car notre survie en dépend. Après quelques aller-retours, la fatigue se fait ressentir et le repas du midi sauté ainsi que la pluie ne sont pas à notre avantage. Nous avons toutefois la chance d'être deux pour la construction de notre abris comparé à la plupart des survivants, mais cela implique une surface plus grande à construire également. Léo se charge de creuser notre « lit » dans la neige afin que nous soyons un peu protégé du vent, pendant que je pars faire la cueillette de branches de sapin, pas si simple à trouver puisque le camp est monté au milieu de bouleaux et d'érables.


La construction d'un feu central collectif aura soudé l'équipe au complet et permis d'apprécier un beau feu digne de la Saint Jean quelques instant seulement, avant que celui-ci ne disparaisse dans les entrailles de la neige et termine son ascension à plus d'un mètre cinquante de la surface, là où la terre apparaît enfin.

Trois heures nous aurons été nécessaires pour le montage du camp et pour tous nous trempé jusqu'à l'os et nous faire ressentir le degrés positif bien plus froid qu'il ne l'est en réalité.


Fort heureusement, notre guide avait fait en sorte que nous soyons proche d'un refuge en vue de la météo catastrophique prévue sur le week-end. Nous y avons donc passer quelques heures entre une tentative de séchage de linge, allumage de feu à la pierre en magnésium et fabrication de collet, petit pièges de trappeur faisant souvent plus office à une occupation mentale qu'à un véritable moyen de se procurer de la nourriture.


Et la nourriture, tiens, parlons en. L'un des caractéristiques de ce stage était de ne pas ramener de nourriture et de se contenter de ce que la nature peut nous offrir. Cela devient cependant problématique lorsque le printemps n'a pas vraiment fait son apparition vu toute la neige encore présente au sol. Impossible d'atteindre quelconque racine, absence totale de fleur et d'insectes dans ce monde où le blanc manteau est omniprésent. Seuls les jeunes bourgeons, véritable signe que la saison hivernale est techniquement terminée, sont la seule source de nourriture comestible. On passe donc en mode chevreuil et dès qu'on a un petit creux, on mastique une dizaine de ces petits coupe-faim remplis de fibre qui vont tenir Monsieur l'estomac occupé un certain temps. Ça paraît fou, mais ça marche ! Ma plus grande peur pendant ce stage était de ressentir la faim, nous avions même emporter des sandwichs « au cas où ». C'est un peu de la triche, certes, mais nous n'y avons même pas touché et croyez moi, c'est bien plus difficile de se retenir de manger lorsque la nourriture est à porté de main que lorsqu'elle n'est pas présente du tout. Toujours est-il que les bourgeons, coupent peut être la faim, mais une fourmi serait à elle seule plus calorique que tout une poignée de ces végétaux. Il n'y a pas de quoi paniquer non plus, car l'homme peut tenir environ trois semaines sans manger, lorsqu'il s'agit de survie ! Mais qui dit survie, dit économie d'énergie : on passe en mode « avion » comme nos téléphones pour garder de la batterie le plus longtemps possible en limitant au maximum ses déplacements et en attendant gentiment les secours.


Une chose est sure, c'est que nous ne risquons pas de manquer d'eau avec toute cette neige qui nous entoure. Même si elle n'est composé qu'à trente pourcent d'eau, et qu'il faudrait en faire bouillir une grande quantité pour avoir de quoi se réhydrater, la ressource primaire à l'homme ne manque pas. On varie les plaisirs en faisant une infusion au sapin, meilleur ami des survivants entre ses branches faisant office de toit à nos abris et sa sève pouvant servir de pansement naturel en cas de blessure.


Le plus compliqué dans cette affaire, c'est de rester occupé, car pour l'avoir expérimenté, une soirée sous la flotte à regarder un feu et attendre que l'heure du coucher arrive semble une éternité. Sachant qu'il faut économiser son énergie, que faire si on n'a pas un bon bouquin dans son sac ? On médite sur soit-même : « survivre ou ne pas survivre, tel est la question » ; on fabrique des collets dans l'espoir de choper un écureuil ou un lièvre pour avoir un peu plus de calories que les bourgeons précédemment ingérés ; on sculpte des outils en bois comme des cuillères qui pourraient servir pour manger l'écureuil attrapé dans nos collets un peu plus tôt, etc...


Bon forcement, quand il pleut la meilleure chose à faire est de rester protégé dans son abris. Résultat des courses, nous nous sommes tous couchés vers 19h30, de nouveau trempé, dans des abris absolument pas waterproof vue la quantité de flotte tombée. La température légèrement positive comprise entre un et trois degrés est plus à notre désavantage qu'un petit moins dix degrés qui aurait transformé la pluie en neige beaucoup moins humide.


On s'enfile dans son sac de couchage déjà trempé car le sapin du toit goutte de partout et là, deux solution s'offre à nous: Soit on reste tout habillé avec des fringues trempées de la journée où on est presque sur d'avoir froid, soit sans les fringues mouillées où on est tout aussi sur d'avoir froid car on n'est pas assez couvert dans un lit déjà bien mouillé. Les pieds et les mains sont gelés, le lit de sapin recouvrant la neige n'est absolument pas imperméable et on sent le froid en dessous de nous pénétrer dans notre dos. On décide alors de se mettre sur le coté afin d'avoir le moins de peau possible en contact avec le sol. On s'emmitoufle entièrement dans notre sac de couchage avec seulement le nez de sorti pour respirer et là, on se concentre pour calmer son corps des grelottements et faire abstraction du froid et de l'humidité quand soudain, une goutte d'eau glacée nous tombe en plein sur le pif. Voilà le genre de nuit que tu passes en survie !


Je me retrouve à discuter avec mon père et ma sœur, à leur raconter la nuit de merde que j'ai passé dans le bois, à dormir sur de la neige avec une pluie interminable qui m'a bien plus gelé le sang que les moins vingt que nous avons connu pendant l'hiver puis tout à coup, le noir complet, la pluie qui tombe et le froid qui me pique les membres. Le retour brutal à la réalité est moralement atroce. Rêver que ce cauchemars était fini semblait merveilleux, malheureusement, il va me falloir patienter encore quelques heures avant que tout cela ne soit véritablement du passé. Au court de cette nuit, nous avons du nous réveiller et rendormir une bonne dizaine de fois avec toujours l'espoir que le petit jour se lève pour mettre fin à cette torture mentale et physique. Quand finalement la lumière au bout de l’abri fini par apparaître, nous signons la fin de cette nuit maudite, mais nous avons réussi. Certains on fini leur nuit dans le refuge à quelques centaines de mètres mais nous avons été courageux et dormi dans le bois comme de vrais survivants. La sensation de fierté dépasse le fait que nous soyons trempés et gelés et comme lors d'un accouchement, toute la souffrance est derrière nous et les sourires sur nos visages font l'unanimité. Une fois l'excitation redescendue, l'humidité reprend le dessus : il n'est que 6 heures du matin, la pluie tombe toujours à seaux et nous avons encore presque 10 heures de stage à tenir.

Autant vous dire que l'ascenseur émotionnel pendant ces deux jours aura été très marqué. Heureusement, le retour au refuge avec un bon feu et un toit imperméable sera une bénédiction pour tous. Au cours de la matinée, nous avons appris à tuer une truite (gentiment pêchée pour nous) à la main et profiter d'un véritable festin au petit déjeuner. Même si la faim n'était toujours pas présente, on ne crache pas sur une bonne truite fraîche et chaude. Nous étions censés la faire cuire avec un feu allumé individuellement mais les conditions météo auront eu raison de nous, et après quelques tentatives non fluctuante, chacun d'entre nous s'est finalement laissé tenté par une cuisson en papillote sur le poêle du refuge où un assaisonnement aux branches de sapin et sirop d'érable nous auront réchauffé les cœurs.


La fin du stage se rapproche de plus en plus et nous n'avons qu'une idée en tête, se plonger dans un bon bain chaud. Une chance car nous bénéficions dans notre petit chalet d'une superbe baignoire à remous. Malgré la météo désastreuse nous ayant suivie tout au long de ce week end, ce stage de survie fut dans son ensemble positif et je recommande l'expérience à quiconque souhaiterais dépasser ses limites !